Voilà. Là par exemple. Pile maintenant. En cet instant précis. En ce souffle que j'expire lentement. Dans l'instant, j'ai envie de le saigner d'une oreille à l'autre.
Je me redresse à sa suite. Je sentirais presque le regard lourd de mon ami prêtre sur ma nuque. Le poids de la morale d'un Aresmus qui saurait pertinemment que je suis un assassin et qui m'enjoindrait de n'en rien faire. D'ailleurs ne le sait-il pas ? N'est-il pas mort ? N'est-il pas là ? Toutes les histoires du passé me sautent à la figure, puis glissent doucement jusqu'au plancher.
Bouge ta grosse carcasse alors. Vient lui cracher trois mots qui montreront que tu n'es pas une bête et je finirais par m'arranger du reste, comme d'habitude.
Je me tourne vers la cuisine, rapidement, et m'apprête à avancer. Il ne me frapperait tout de même pas de dos ? J'ose l'espérer en tous cas. Je pense qu'un coup de plus sur le crâne me le ferait, de toute façon, exploser comme un melon bien mûr qui traîne au soleil. Ce ne sera pas acceptable, je le sais déjà. Mais au moins ai-je essayé. Et j'espère ne planter ma dague dans personne aujourd'hui, pas même cet abruti.
Je n'ai même pas répondu à Aube, songé-je incongrûment... Il faut dire que la question polie était moins percutante...