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novembre 10, 2024, 20:23:25
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AuteurSujet:  Par les chemins d'automne - acte V : Pont aux Haches  (Lu 177807 fois)

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Re : Par les chemins d'automne - acte V : Pont aux Haches
« le: février 18, 2018, 15:38:51 »
Je crois que les mots m'ont fait plus de mal que l'impressionnante mandale qui vient de me fendre le crâne. Me tuer ? A ce point ? J'eus pu encaisser les insultes avec rien de plus grave qu'un ego froissé mais là...

J'en reste sans voix le laissant partir, regardant sur le pont de pierre, ma mission s'en aller, portée en bandoulière par mon meilleur ami. Je n'essaie pas de bouger. Autant demeurer là. Le destin est bien plus incertain qu'il n'y parait. Jamais une seconde je n'aurais envisagé le perdre. Pas une fois je n'ai imaginé ma vie sans mon camarade. Chaque fois que je me suis projeté dans l'avenir, qu'il ait été florissant ou non, Thibaut était là, compagnon de misère ou, lointain, mais toujours aimant, Seigneur de Chateaujardin. Plus sûr qu'un frère, telle était ma certitude. C'est cette conviction brisée qui m'ébranle et m'empêche de respirer. Un instant je crois vraiment suffoquer. J'ai l'impression de me noyer. Je me mets à genoux, sans plus de grâce qu'un animal blessé et je gerbe tripes et boyaux, sentant mon estomac se convulser et ma gorge se serrer.

Tristane n'a pas bougé. D'un ou deux coup de sabots nerveux au sol, elle projette de la boue sur mes vêtements déjà maculés de saletés et de sang. Puissent les Dieux être miséricordieux...

Je ne sais combien de temps je suis resté là, courbé dans la fange, à vomir et pleurer. Jusqu'à ce qu'il pleuve.

Eh ! Eh, mon gars. Faut pas rester là, m'ordonne une voix d'homme.

Je me redresse et ma tête manque d'exploser. Je le parierai.

Crévindieu... Ça, ça doit être la cicatrice, qui lui fait dire ça. Ou les yeux boursouflés. Ou la blessure à la tête. Ou le sang. Qu'est-ce que j'en sais après tout ?

La jument hennit doucement. Je sens qu'on m’attrape par un bras et qu'on me soulève, avec difficulté. Ben tu pèses plus lourd qu't'en as l'air tin! T'es cuit mon gars ou tu t'es fait rouster ? Je jargouine quelques mots incompréhensibles. Nan bah écoute, vaut ben m'eux que tu fasses le taiseux hein Vous m'emmenez où là ? pensé-je dire, alors que ce n'est que sanglots et autres borborygmes hachés. Tais-toi, va. 'va voir l'toubib, ça ira mieux.
« Modifié: mars 08, 2018, 00:06:04 par Astérion »

 

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